Jeudi
16 mai 2019, 7h du matin.
L’autocar grand tourisme de l’agence JIP Tours quitte Dijon après
avoir pris en charge 36 participants en deux points de ramassage, à
Gevrey-Chambertin et Cours du Général-de-Gaulle à Dijon. Notre accompagnateur,
Jacques, nous accueille et nous rappelle les différentes étapes de notre
première journée en Alsace : visite autoguidée du musée de l’automobile à
Mulhouse, déjeuner alsacien à l’auberge de l’écomusée d’Alsace et visite libre
du musée de plein air, visite d’une cave et dégustation pour terminer par un
dîner alsacien et une nuit reposante à
l’Hôtel Vaillant à Sélestat.
La cité de l’automobile, musée national, collection Schlumpf.
Comme prévu, nous pénétrons à 10 heures dans cet espace de
17 000 m², magnifique cadre d’une
ancienne filature de laine peignée édifiée en 1880, où les amateurs
d’automobiles et de patrimoines variés, vont découvrir 500 voitures de rêve.
Un film, judicieusement présenté dès le début de la visite, nous
explique comment la filature devient musée de l’automobile, grâce au destin
croisé de trois hommes, les frères Hans et Fritz Schlumpf
et Ettore Bugatti, trois industriels nés en Italie, implantés en Alsace et
passionnés d’automobile, dans un contexte de déclin de l’industrie textile.
Petit rappel historique : Hans et Fritz Schlumpf
sont nés près de Milan. Leur maman, Jeanne, originaire de Mulhouse, devenue
veuve, revient dans sa région natale pour élever ses fils. Les deux frères se
lancent dans la finance, deviennent d’habiles spéculateurs, font fortune et
investissent dans le textile alsacien. Ils créent la Société anonyme pour
l’industrie lainière en 1935 et développent leur empire. A 34 ans, en 1940, Fritz est PDG d’une filature à Malmerspach, au nord de Mulhouse. Non loin de là, à
Molsheim-Dorlisheim, Ettore Bugatti, génial concepteur et pilote de voitures de courses
d’élite, fonde ses ateliers en 1909, avec son père, son frère et ses fils.
Fritz Schlumpf le rencontre vers 1930, tombe sous le
charme de ses créations et de sa personnalité de patron et en fait son modèle.
Fritz achète des modèles bien au-delà des frontières et rassemble au fil des
ans plus de 400 pièces, véhicules, châssis, moteurs, dont de nombreuses
voitures Bugatti et Rolls-Royce. Il abrite cette collection unique dès 1964
dans ses filatures de Mulhouse, dont il aménage luxueusement une partie des
bâtiments… le futur musée ! L’équipe d’ouvriers chargée de la restauration
des voitures est tenue au secret.
Mais dans les années 1970, l’industrie textile décline et en 1976,
les frères Schlumpf cèdent leurs usines. En octobre,
l’usine de Malmerspach licencie et un conflit social
éclate. Les frères Schlumpf se réfugient en Suisse.
En mars 1977, des syndicalistes pénètrent dans l’usine de Mulhouse et
découvrent la superbe collection de voitures. Ils baptisent le site
« Musée des travailleurs » et l’occupent pendant deux ans. Ils
veulent vendre la collection pour combler le déficit de leur employeur. Le procès
de l’Affaire Schlumpf est interminable. Pour éviter
la dispersion de la collection, le Conseil d’État la fait classer à
l’inventaire des monuments historiques en 1978. La justice autorise en 1981 la
vente des véhicules, terrains et bâtiments à l’Association du musée national de
l’automobile, créée pour l’occasion par les collectivités territoriales
locales, la Chambre de commerce Sud-Alsace et l’automobile club de France
présidé par Jean Panhard, pour
sauver cet exceptionnel patrimoine national et le maintenir à Mulhouse. Le
musée ouvre ses portes en 1982 et grâce à la gestion de cette association
connaîtra plusieurs évolutions pour devenir en 2006 « la Cité de
l’automobile », rénovée, embellie,
agrandie, et dotée d’une muséographie moderne, s’appuyant sur les dernières
innovations multimédias.
Muni chacun d’un audioguide, nous partons à la découverte de la
collection répartie en trois grands espaces : l’aventure automobile, la
course automobile et les chefs-d’œuvre de l’automobile où les véhicules sont
classés par ordre chronologique. Nous ne pouvons qu’admirer la somptueuse
grande salle ornée de 900 lampadaires du Pont Alexandre III. Il est impossible
de lister, ni les 500 véhicules de légende qui jalonnent le parcours de 1878 à
nos jours, ni les 100 marques qui suscitent chez le visiteur des émotions, des
souvenirs personnels ou des rêves : Bugatti, bien sûr, mais aussi Panhard
&Levassor, Peugeot, Mercedes, Hispano Suiza,
Rolls Royce, Alfa Roméo, Citroën, De Dion Bouton, Ferrari, Gordini,
Maserati, Renault, Benz…
Notre déambulation nous conduit à quelques perles rares, voire
uniques au monde. Citons:
- le Coupé Napoléon, prototype de 1929, de la série des Bugatti
« Royales », dont la carrosserie a été dessinée à l’âge de 20 ans par
Jean Bugatti, fils ainé d’Ettore Bugatti ;
- la Benz Victoria de 1893, première voiture à pétrole vis-à-vis,
qui parcourut plus de 100 kms sur une grande route grâce à l’audace de madame
Berta Benz et de ses deux fils en cachette du mari, père et … constructeur du
véhicule !
- la Jacquot de 1878, commandée par le Docteur Jacquot, médecin de
Chantilly, à un artisan, le forgeron Barbier, à qui il demanda un véhicule de
petite taille mû par la vapeur ; cet engin unique est construit comme une petite
locomotive, avec chaudière et deux moteurs à l’avant, la transmission aux roues
arrières se faisant par des engrenages et des courroies perforées ;
- la Renault AG1 de 1908, connue dans sa version dite
« Taxi », immortalisée par l’épopée dite des «taxis de la
Marne » : 600 taxis parisiens réquisitionnés par le Général Gallieni,
transportèrent le 7 septembre 1914, 6000 soldats appelés en renfort sur le
front, l’armée allemande ayant atteint la Marne et s’approchant des portes de
Paris. Cette manœuvre d’ampleur, symbole d’unité et de solidarité nationales,
eut un réel impact psychologique sur la population française ;
Nous pouvons admirer une superbe collection de voitures d’enfants
particulièrement mise en valeur dans sa présentation ludique.